Philippe Croizon, conférencier et consultant en entreprise, revient sur son histoire et met l’accent sur l’importance de la résilience et du collectif pour relever les défis de demain.
Dans vos différentes prises de paroles, vous insistez sur l’importance de l’équipe et du collectif. À quel point c’est important, en entreprise notamment ?
L’équipe, c’est la clé de la réussite. Mon énergie et ma détermination viennent de mon équipe. Quand je ne vais pas bien, mon équipe est là pour me remonter le moral. Et inversement. Le “je” n’existe pas : on avance ensemble, on réussit ensemble. Après mon accident, et pendant des années, mon père avait dit à mes proches : “il est interdit de pleurer devant Philippe, on doit lui montrer qu’on est fort”. Il voulait me protéger mais il avait tort. Alors quand j’ai monté mon équipe, j’ai souhaité que tout le monde puisse s’exprimer librement. Surtout pas de non-dits, sinon on n’y arrivera pas. Et je pense qu’en entreprise, au-delà du travail en équipe qui est indispensable à la réussite, il faut réussir à créer un climat de confiance. Il est primordial que les collaborateurs puissent s’exprimer sans crainte, qu’ils se sentent écoutés et encore mieux, compris. La communication est le fondement de la réussite collective.
Les chefs d’entreprise, les DRH ou encore les managers ne doivent pas se renfermer sur eux-mêmes face aux problèmes, au risque d’échouer. Au contraire, ils doivent communiquer. Si l’entreprise rencontre des difficultés par exemple, les collaborateurs sont capables de le comprendre, voire de trouver des solutions efficaces. Culturellement dans notre société, on n’ose pas demander de l’aide, c’est dommage. Alors que ce qu’il y a de plus beau dans la réussite, et je parle par expérience, c’est ce moment où une fois l’objectif atteint, on se regarde dans les yeux et on se dit en chœur “putain, on l’a fait !”. Pourquoi j’ai réussi à traverser la Manche ou à relier les cinq continents à la nage ? Simplement, parce que j’ai osé demander un coup de main.
Les entreprises font, et feront encore demain, face à de nombreux changements. D’après vous, comment conduire le changement le plus sereinement possible ?
Anticiper le changement c’est bien, mais malheureusement ce n’est pas toujours possible. Jamais je n’aurais pu prévoir mon accident. Et qui aurait pu prévoir la crise sanitaire que nous venons de traverser ? Selon moi, la clé c’est l’adaptation. Il faut faire preuve de résilience pour s’adapter aux changements, dans la vie comme en entreprise. Avant même mon accident, je m’adaptais. J’ai été en échec scolaire pendant longtemps, mais je me suis adapté. Je travaillais et en parallèle j’allais à l’école. Et puis après, j’ai démonté une antenne de télévision qui a provoqué mon accident et j’ai dû me réadapter encore une fois. Donc pour moi, le secret c’est d’accepter le changement, même si c’est difficile et que ça prend du temps.
Bien sûr, si la première étape est d’accepter le changement, il faut ensuite aller de l’avant et se fixer de nouveaux objectifs. Moi c’est avant tout le soutien de mes proches et plus particulièrement de ma femme qui m’a aidé à réaliser mes rêves. Je pense que l’on peut facilement traduire ça avec le monde du travail. Une entreprise qui a un objectif à atteindre, doit faire en sorte que cet objectif devienne collectif. Si l’on prend l’exemple d’une entreprise au management pyramidal par exemple, avec les managers qui ordonnent en quelque sorte à leurs équipes de réaliser une tâche : les collaborateurs vont le faire, certes, mais de manière détachée, sans aucun plaisir. En revanche, si l’entreprise a un nouveau projet et que les managers, via une bonne communication arrivent à faire naître l’envie dans le cœur et l’esprit des collaborateurs, alors elle a tout gagné. La direction, les managers et les chefs de poste doivent porter leurs équipes, les motiver et les rassembler autour d’un objectif ou d’une passion commune pour mener à bien les futurs projets. Et selon moi, l’optimisme, le rêve et la positivité sont des leviers indispensables à la motivation.
Si vous aviez un conseil à donner, ce serait quoi ?
Faites confiance à vos équipes ! Donner sa confiance à quelqu’un, c’est un vrai cadeau. Quand je dis à un de mes mécaniciens sur le Paris-Dakar auquel j’ai participé en 2017 : “j’ai confiance en toi, répare-moi la caisse”, son énergie est à 1000%. A contrario, ce qui m’a fait tenir dans toutes mes aventures, c’est la confiance que les gens m’ont apportée. Quand j’étais à bout de souffle au milieu de la Manche, c’est cette confiance-là qui m’a donné la force de continuer.
En entreprise c’est pareil, avoir confiance en ses collaborateurs c’est les valoriser, les pousser à se dépasser. La confiance est également une clé de l’amélioration, notamment à travers la formation professionnelle. Et puis ne pas négliger le plaisir ! Un salarié qui arrive au travail et qui est heureux d’être là peut déplacer des montagnes. Selon moi, il faut vraiment que les entreprises comprennent que les collaborateurs, et notamment les jeunes qui ont été malmenés durant la crise sanitaire, ont besoin de se sentir bien, de s’épanouir et de prendre du plaisir, même au travail.
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