À LA UNE

Vincent Kraus, la finance au service d’une agriculture positive

L’agriculture est souvent montrée du doigt en ce qui concerne l’environnement. La finance quant à elle souffre d’une image peu compatible avec le bien être social. Vincent Kraus, cofondateur de la foncière FEVE (Fermes EN VIE), veut prouver que tout n’est pas tout blanc ou tout noir dans ce monde, en se battant pour soutenir une agriculture à l’impact positif au sens large.  

Vincent Kraus est ingénieur de formation, passé par l’Ecole Polytechnique. Après un début de carrière dans la finance, une première expérience entrepreneuriale revendue à une mutuelle, notre homme a souhaité recréer une entreprise dont l’activité aurait un impact positif sur l’environnement au sens large. « Je me sens concerné par les enjeux sociaux et environnementaux et mon idée était d’être actif dans ce cadre, via la création d’entreprise, parce que c’est ce que je sais faire ».

Après quelques réflexions Vincent s’est finalement focalisé sur l’agriculture, « convaincu qu’il s’agit de l’un des enjeux majeurs des prochaines années. L’agriculture touche à la fois au carbone, à la biodiversité, à l’eau mais c’est aussi ce qui nous nourrit», explique-t-il.

Mais pour que la démarche soit positive, Vincent a réfléchi à ce qu’il pouvait faire pour essayer d’accélérer la transition agroécologique. Après avoir rencontré deux ingénieurs agronomes, dont un dans le cadre d’un accélérateur de start-up à impact, il décide de s’associer et de créer FEVE.

Derrière FEVE se trouve une foncière dont le but est d’aider financièrement les agriculteurs dans leur installation lorsqu’ils sont dans un projet agroécologique.

« Contrairement à ce qui se passait il y a quelques dizaines d’années les fermes sont de moins en moins reprises par les enfants des agriculteurs qui partent à la retraite. Environ deux tiers des personnes qui s’installent le font hors du cadre familial, c’est-à-dire qu’elles n’ont pas hérité des terres de leurs parents et doivent donc financer l’acquisition de foncier pour s’installer. », souligne Vincent Kraus.

Or si on prend la ferme moyenne, soixante-dix hectares en France, avec un hectare à six mille euros, cela représente un investissement de 400 000 euros de terres. Auxquels il faut rajouter les bâtiments, soit 300 000 euros de plus auquel on additionne les couts pour le matériel, l’équipement, et éventuellement le cheptel si on fait de l’élevage, encore 300 000 euros. Soit pour quelqu’un qui s’installe, un investissement de l’ordre du million d’euros !

« La majorité n’a pas l’apport suffisant pour aller emprunter auprès des banques. C’est là que FEVE intervient pour pouvoir déjà abaisser la partie de financement du foncier, à savoir les terres agricoles et quelques bâtiments éventuellement », explique Vincent.

FEVE va acheter les terres et l’agriculteur va en devenir le locataire avec une possibilité d’acheter à terme. Pour ce qui est des investisseurs, FEVE étant une société à capital variable, les personnes souhaitant financer les projets en achètent des parts sociales. Cela fonctionne un peu comme une SCPI (Société Civile de Placement Immobilier) puisque l’on investit dans un objet qui mutualise des investissements dans différentes fermes.

C’est ainsi qu’aujourd’hui FEVE a su séduire des personnes désireuses de placer leur épargne dans des projets plus concrets, avec une utilité sociale et environnementale assez forte. « D’autant plus qu’investir dans du foncier agricole est relativement peu risqué, et que la foncière possède l’agrément ESUS (Entreprise Solidaire d’Utilité Sociale) de l’économie sociale et solidaire qui donne droit à une réduction d’impôt de 25% du montant investi. Cela permet d’augmenter la rentabilité financière de l’investissement », souhaite préciser Vincent Kraus.

Aussi, derrière la promotion et le soutien de ces projets socialement et environnementalement intéressants, se trouve en filigrane la souveraineté alimentaire de la France. Car comme le rappelle Vincent Kraus, « les producteurs qui revendiquent la nécessité d’une production agricole française en important des engrais dérivés de gaz, des pesticides dérivés de la pétrochimie, indépendamment de l’impact environnemental oublient en fait la question de la souveraineté alimentaire puisque nous ne disposons pas en France de gaz et de pétrole ».

Et Vincent Kraus est persuadé qu’il existe aujourd’hui une autre voie. « Nous pouvons faire sans gaz et pétrole. Nous obtenons des résultats très intéressants sur pas mal de fermes, avec des rendements tout à fait corrects, avec une meilleure qualité et sans avoir forcément besoin de faire venir des intrants de l’extérieur pour fertiliser ou protéger l’agriculture ».

FEVE a pu en faire le constat sur les 19 projets déjà aidés.  Et cela dans tous types de production agricole, excepté la vigne, puisque FEVE peut aujourd’hui revendiquer ses soutiens à du maraîchage, de l’arboriculture, des grandes cultures, de l’élevage, avec du lait, de la viande. «  Nous nous conformons depuis toujours à une charte agroécologique, assez ambitieuse, qui tend vers du bio régénératif. A savoir produire bio, avec une grosse diversification de cultures, avec des infrastructures écologiques, tels les points d’eau, les prairies, etc., en essayant de conserver les sols toujours couverts »

Ainsi après avoir collecté près de 15 millions d’euros auprès de 1500 personnes, avec un investissement moyen à 10 000 euros et qui commence à 500, FEVE ne cache pas ses ambitions. « Nous devons continuer d’accélérer, l’objectif est de soutenir 25 projets cette année et de doubler l’an prochain », confie Vincent.

Pour cela la foncière vise bien sûr l’engouement citoyen, mais aussi la participation institutionnelle, grâce à des fonds d’investissement qui s’intéressent aujourd’hui à l’économie sociale et solidaire. La transition souhaitable semble devenir faisable !

En savoir plus : FEVE

Propos recueillis par Christophe Hamieau pour Xilam Green.

Bonjour 👋

Abonnez-vous à XILAM GREEN et restez informé chaque mois.

En renseignant votre adresse e-mail, vous acceptez de recevoir la newsletter, et vous acceptez notre politique de confidentialité.

Vous aimerez aussi

À LA UNE

Travailler dans une entreprise en croissance, c’est bien

Asseoir cette croissance économique en se préoccupant de son impact sur son environnement social, sociétal et en luttant contre le
À LA UNE

Nicolas Deveaux, bien décidé à ne pas faire l’autruche

Auteur réalisateur Nicolas Deveaux est arrivé chez Cube avec un projet baptisé « 7 tonnes 2 », un court métrage